La Lettre du RAFAL n° 34 du 16 novembre 2011

Bulletin d’information
du Réseau africain francophone sur les armes légères,
pour la prévention des conflits et la construction de la paix

Edité par le GRIP
Chaussée de Louvain, 467 - B1030 Bruxelles
Tél.: (32.2) 241.84.20 - Fax: (32.2) 245.19.33
Courriel : m.luntumbue@grip.org
Internet : http://www.reseau-rafal.org/
Ed. resp.: Luc Mampaey

Cette publication est réalisée dans le cadre des projets du GRIP sur les armes légères, la prévention des conflits et la construction de la paix en Afrique, avec le soutien du Ministère belge des Affaires étrangères, du Ministère de la Communauté française de Belgique et du Ministère des Affaires étrangères du Luxembourg.

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1. Actualité des armes légères et de petit calibre (ALPC)

Les Etats du Sahel face au trafic d’armes libyennes

Début octobre, des soldats algériens ont abattu huit individus et en avaient blessé trois autres dans la région désertique proche de la frontière nigérienne. Les soldats ont saisi des armes venues de Libye, notamment des missiles antichars de fabrication russe, des roquettes de moyenne portée, une grande quantité de munitions et d'explosifs, ainsi que des postes émetteurs modernes sans fil. Début novembre, un accrochage entre l'armée nigérienne et des individus lourdement armés venant de Libye, en convoi, a fait 13 morts parmi les occupants des véhicules, un parmi les militaires nigériens. Ce sont au total six véhicules 4X4 lourdement armés et transportant une quantité importante d'armes en provenance de Libye qui ont été détruits. Ces événement confirment les craintes, partagées par les gouvernements de la région, de voir des groupes irréguliers profiter de la dissémination d'armes sorties de Libye à la faveur du récent conflit dans ce pays. L'Algérie, le Mali, la Mauritanie et le Niger ont mis en place une cellule de sécurité conjointe destinée à lutter contre les menaces croissantes que pose la circulation de ces armes. Des experts des quatre pays partageront leurs informations et surveilleront les trafics d'armement en provenance de Libye. Une liste de 26 individus soupçonnés d'être de gros trafiquants d'armes libyennes a été émise par les agences de sécurité des Etats membres de cette cellule. Ces suspects sont originaires de Mauritanie, du Mali, du Niger, d'Algérie, du Nigeria, du Tchad, du Sénégal, de Libye et du Burkina Faso. Parmi eux se trouvent notamment Yahia Djouadi, l'émir au Sahara d’Al-Qaïda au Maghreb islamique (AQMI), et son commandant militaire, Abdelhamid Abou Zeid. Selon les experts en armements, quatre groupes opéreraient dans la région. Trois d'entre eux se livrent au trafic d'armes dans la région du Sahel-Sahara et au-delà, et le quatrième opère pour le compte d'AQMI. Les armes transportées en contrebande comprennent des obus d'artillerie, des roquettes antichars et des lance-roquettes. La prolifération de ces armes légères et faciles à cacher s'étend au-delà des pays du Sahel directement affectés par le terrorisme, et pourrait toucher des pays moins exposés à cette menace, comme le Sénégal. Les trafiquants d'armes tirent d’énormes profits de ces transactions. Les petits trafiquants ont pour leur part recours à d'autres méthodes, notamment l'échange de pièces détachées et le troc de combustible contre des armes légères. La guerre en Libye aurait donc fourni aux groupes irréguliers de l’espace saharo-sahélien l'occasion d'obtenir un armement léger parfaitement adapté à la guerre de type guérilla contre les armées régulières de la sous-région. Ce panorama se complexifie avec le retour, depuis la chute du régime du colonel Kadhafi, au mois d'octobre, de plusieurs centaines de combattants touareg originaires du Mali, qui servaient depuis des années sous l'uniforme libyen, rentrés dans leur région d'origine, avec armes et bagages. Le gouvernement malien cherche à racheter les armes en circulation, pour éviter leur dispersion dans le pays, voire qu'elles ne se retournent contre lui.

Sources : http://tchad24.unblog.fr/2011/10/18/les-etats-du-sahel-sunissent-contre-le-trafic-darmes/, http://www.rfi.fr/afrique/20111109-niger-armee-detruit-convoi-armement-libyen-destination-mali, http://www.lexpress.fr/actualite/monde/afrique/mali-des-touaregs-lancent-un-ultimatum-a-aqmi_1047150.html

L’Assemblée nationale tchadienne adopte un projet de loi sur la Convention de Kinshasa

L’Assemblée nationale tchadienne a adopté, le 11 novembre 2011, le projet de loi portant ratification de la Convention de l’Afrique Centrale pour le contrôle des ALPC. Le projet de loi a été adopté à l’unanimité de tous les membres du Parlement, mais il reste au Président de la République du Tchad à prendre un décret de promulgation pour que cette Convention soit ratifiée. La Convention de Kinshasa n’entrera cependant en vigueur qu’après la sixième ratification. La ratification permettra au Secrétariat général de la Communauté économique des États d’Afrique centrale (CEEAC) et aux Etats parties de mettre en œuvre un programme quinquennal d’actions prioritaires contre les armes légères et de petit calibre. Le Tchad, à l’instar des autres pays de la sous-région, a connu des périodes de troubles et des cycles d’instabilité. Et la situation de conflit qui prévaut encore dans certains pays voisins reste une source de préoccupation. La prolifération, la circulation et le trafic des armes constituent, tant pour les civils que pour les Etats, une menace avérée. Les armes légères perpétuent les conflits armés, menacent la paix et la sécurité aussi bien des Etats que les populations. Une des avancées essentielles dans ce projet de loi est qu’il engage les Etats parties à la Convention à lutter contre la prolifération des ALPC et contre la violence armée par la réglementation de la détention d’armes par les civils. Selon les études récentes, près de 875 millions d'ALPC circulent dans le monde dont environ 3/4, c'est-à-dire près de 650 millions sont détenues par les civils. Ces armes constitueraient la quatrième cause des décès dans le monde des personnes dont l’âge varie entre 15 et 44 ans.

Sources : http://actutchad.com/societe/102-societe/1131-assemblee-nationale--les-deputes-adoptent-le-projet-de-loi-sur-la-convention-de-lafrique-centrale-pour-le-controle-des-armes-legeres.html, http://www.congo-site.com/Vers-la-ratification-de-la-convention-de-Kinshasa-sur-les-armes-legeres_a10984.html

Ghana : une initiative de forgerons contre les armes légères

Un groupe de forgerons de la ville de Tamale, dans le nord du Ghana, a décidé début novembre, de mettre un terme à la fabrication et la réparation d’armes illicites, en vue de contribuer à la paix dans sa région. Les forgerons ont également promis de signaler toute personne ou groupe de personnes qui s’adonneraient à la fabrication illicite d'armes, en raison des répercussions négatives de cette activité sur le développement socio-économique du pays. Cette résolution a été prise dans le cadre d'un forum de sensibilisation organisé par la Commission nationale ghanéenne sur les armes légères (GNACSA), avec le soutien du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD). Le forum portait sur le thème «Sécurité humaine et développement économique ». D’après leurs témoignages, nombre de forgerons en viennent à produire des armes légères par nécessité économique. Les sommes proposées par les commanditaires sont attractives au regard du revenu que génère l’activité ordinaire d’un forgeron. Les forgerons appellent à un soutien en vue d’améliorer leurs capacités et leurs conditions économiques. Bien que le Ghana soit considéré comme un havre de paix, la circulation d’armes illicites entre les mains des civils demeure une grande préoccupation pour la Commission, compte tenu de la persistance de certains conflits fonciers et entre chefferies. Actuellement, on estime que 130 000 armes légères sont détenues par les civils, dont seulement 43,2 % seraient enregistrées, tandis que 34 % sont illégalement fabriquées localement, selon un rapport du PNUD sur les armes légères illicites daté de 2004. Environ 80 pour cent des armes fabriquées localement sont utilisées pour commettre des crimes tels que les vols à main armée, d’où la détermination affichée par la Commission pour convaincre, avec d'autres intervenants, les forgerons locaux à ne pas s’engager dans le commerce des armes illicites. La fabrication et la possession d’une arme à feu sans autorisation de la police ghanéenne sont des infractions passibles d’une peine minimale de 10 ans d'emprisonnement. La GNACSA appelle le groupe des forgerons à sensibiliser ses pairs à ne pas s'engager dans le commerce d’armes illicites, qui pourrait les mener à la pauvreté et la précarité. Voir http://www.ghanaweb.com/GhanaHomePage/NewsArchive/artikel.php?ID=222866

Assemblée générale du RASALAC

Le Réseau d’Action sur les Armes légères en Afrique centrale (RASALAC) tiendra son Assemblée générale du 30 novembre au 2 décembre 2011 à Bangui (RCA). Le RASALAC est un réseau sous- régional des organisations de la société civile qui sert de forum pour l’échange d'information, d'expériences et de stratégies en vue de lutter contre la prolifération des ALPC en Afrique centrale, d’œuvrer pour la réduction des causes de la demande et de l’impact négatif de ces armes et de promouvoir la culture de la paix et la gestion pacifique des conflits. Les organisations membres du RAFAL, actives dans la problématique des ALPC, sont les bienvenues au sein du RASALAC en vue d’une dynamisation et d’une amplification de l’action du réseau à partir de l’expérience de chaque recoin de la sous-région. Pour tout renseignement s’adresser à Mouldidje Ngaryngam, Président du RASALAC, tél : +235.66.29.35.31, courriel : nmouldjide@yahoo.fr

2. Activités des membres

Le RAFAL accueille un nouveau membre, l’association PNS de la RD Congo

L’association pour la Promotion Nutritionnelle et Sanitaire, basée à Mbanza-Ngungu dans la province du Bas-Congo, est notamment active dans le domaine de la promotion des soins de santé primaire, la réinsertion socio-économico-professionnelle, la résolution pacifique des conflits, et la lutte contre le trafic et l’utilisation abusive des armes de guerre, des armes locales et des armes blanches. Consultez sa fiche de présentation sur

 http://www.reseau-rafal.org/siteweb/dev.asp?N=simple&O=509

L’AVOLAR se dote d’un nouveau site web

L’Association des Volontaires pour l'Autopromotion Rurale (http://www.reseau-rafal.org/siteweb/dev.asp?N=simple&O=342), située à Mbanza-Ngungu, dans la province du Bas-Congo, en RD Congo, se dote d’un nouveau site internet pour optimiser sa communication. Visitez-le sur http://www.rdc-avolar.fr.gd/.  

Monitoring sur la violence armée au Nord-Kivu, les rapports de l’ACPD

L’ACPD poursuit son travail de veille sur la situation sécuritaire et les violations des droits de l'homme en province du Nord-Kivu. Consultez ses rapports mensuels sur

 http://www.reseau-rafal.org/siteweb/dev.asp?N=simple&O=467

Périscope, le bulletin d’information de la CPD

Au Burundi, le contexte post-électoral reste lourd de menaces d’une reprise de la violence armée. Le chef de file du FNL, principal parti d’opposition, Aghaton RWASA vit dans la clandestinité depuis les élections générales de 2010. Il serait, selon les rumeurs, en train de former une nouvelle milice afin de s’emparer du pouvoir par la force des armes. Ce climat constitue une source d’insécurité psychosociale. Découvrez le nouveau Périscope (novembre 2011) sur

 http://www.reseau-rafal.org/siteweb/dev.asp?N=simple&O=321

 

3. Publications récentes

Linda Farhat et Jihan Seniora, « Acquisitions d’armes par les acteurs non étatiques : pour une régulation plus stricte ? », Note d’Analyse du GRIP, 4 novembre 2011

Comme le cas libyen l’a récemment rappelé, les risques liés à l’acquisition d’armes par des acteurs non étatiques sont bien réels et peuvent avoir des impacts négatifs, en termes de prolifération, sur le court et le long terme tant au niveau d’un pays qu’au niveau régional. De plus, les acquisitions en armes et en munitions ont un impact déterminant sur la nature et l’intensité d’un conflit ainsi que sur le contexte post-conflit. Prolifération des armes aux mains des civils, détournements vers des acteurs non souhaités, violations des droits humains : la problématique des acteurs non étatiques doit amener les États à considérer leur relation avec ceux-ci avec une grande prudence. Ceci est d’autant plus vrai que l’État reste le principal fournisseur en armes pour ce type d’acteurs, qu’il le veuille ou non.

 Acquisitions d’armes par les acteurs non étatiques : pour une régulation plus stricte ?

Priscilla Sadatchy, « Le Mouvement des Nigériens pour la Justice–MNJ », Note d’Analyse du GRIP, 3 novembre 2011

La menace que représentent les groupes armés et les groupes terroristes pour la paix et la sécurité en Afrique de l’Ouest, mérite qu’on s’attarde à mieux les connaître. Cette fiche sur le Mouvement des Nigériens pour la Justice (MNJ) a pour but de donner une information sur les fondements historiques et idéologiques de cette rébellion touarègue issue du Nord du Niger. Elle en aborde les modes opératoires et la zone d’influence. Les sources diverses de financement et les soutiens du groupe, notamment celui apporté en son temps par Mouammar Kadhafi, sont également abordés. Enfin, les actions les plus significatives de ce groupe armé sont répertoriées. Cette fiche fait partie d’une série de fiches sur les groupes armés en Afrique de l’Ouest.

 Le Mouvement des Nigériens pour la Justice – MNJ

Bérangère Rouppert, « Monitoring de la stabilité régionale dans le bassin sahélien et en Afrique de l’Ouest », Note d’Analyse du GRIP, 27 octobre 2011

Ce monitoring trimestriel est réalisé dans le cadre d’un projet d’une durée de trois ans (2011-2013) intitulé « Amélioration de la sécurité humaine, prévention des conflits et renforcement de l’état de droit dans huit pays d’Afrique occidentale et centrale » financé par le Ministère des Affaires étrangères du Grand-Duché du Luxembourg. Il a pour but de suivre la situation sécuritaire en Afrique de l’Ouest avec un accent plus particulier sur le Burkina Faso, la Côte d’Ivoire, le Mali, le Niger et le Sénégal. Il se penche en particulier sur les questions liées aux tensions régionales, au terrorisme et aux trafics transfrontaliers, à la production et aux transferts d’armements et aux mécanismes de coopération en matière de lutte contre le terrorisme et la criminalité transnationale organisée.

 Monitoring de la stabilité régionale dans le bassin sahélien et en Afrique de l’Ouest