La Lettre du RAFAL n° 3 du 23 mars 2006
Bulletin d’information
du Réseau africain francophone sur les armes légères,
pour la prévention des conflits et la construction de la paix
Edité par le GRIP
Chaussée de Louvain, 467 - B1030 Bruxelles
Tél.: (32.2) 241.84.20 - Fax: (32.2) 245.19.33
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Internet : http://www.reseau-rafal.org/
Ed. resp.: Luc Mampaey
Cette publication est réalisée dans le cadre des projets du GRIP sur les armes légères, la prévention des conflits et la construction de la paix en Afrique, avec le soutien du Ministère belge des Affaires étrangères, du Ministère de la Communauté française de Belgique et du Ministère des Affaires étrangères du Luxembourg.


1. RÉUNION D'EXPERTS À ABUJA SUR LA CONVENTION DE LA CEDEAO SUR LES ALPC
Ilhan Berkol et Claudio Gramizzi, chercheurs du GRIP, ont participé, les 9 et 10 mars 2006 à Abuja (Nigeria), à une réunion d'experts indépendants chargée d'examiner le projet de convention sur les armes légères et de petit calibre (ALPC) de la Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest (CEDEAO).
La réunion a rassemblé 20 experts, régionaux et internationaux, en matière des ALPC. Elle a connu la participation de plusieurs personnalités, dont le Dr. Ivor Fung, directeur du Centre régional des Nations unies pour la Paix et le Désarmement en Afrique (UNREC), qui a présidé les travaux des experts; le général Okae, directeur des affaires de défense et de sécurité de la CEDEAO; M. Olu Arowobusoye, directeur des affaires humanitaires; M. Cyriaque Agnekethon, responsable de l'Unité ALPC du Secrétariat exécutif de la CEDEAO; M. Alex Vines, président de la Commission d'enquête de l'Onu sur l'embargo sur les armes en Côte d'Ivoire; mais aussi des représentants de la société civile comme M. Orji Dickson (RASALAO), Hélène Cissé (Afstrag), Alussala Nelson (ISS), Mohammed Coulibaly (Oxfam Grande Bretagne) ou Alun Howard (IANSA).
Pour rappel, c'est en décembre 2002 que les Chefs d’État et de Gouvernement ont décidé de transformer le Moratoire de la CEDEAO sur l’importation, l’exportation et la fabrication des ALPC en une Convention. Le Secrétariat de la CEDEAO, avec l'appui de la Commission européenne, du Canada et de l’Ambassade de Suisse à Abuja, a oeuvré pour la mise en oeuvre de cette décision. Il a ainsi recruté deux consultants, à savoir Dr. Sola Ogunbanwo et Ilhan Berkol pour rédiger la première version du projet de convention.
La Convention met l'accent sur l'interdiction des transferts aux acteurs non-étatiques (une première de ce genre dans le monde), la création de registres d’armes nationaux et régionaux, la reconnaissance de la fabrication locale et de la nécessité de la réglementer, ainsi que le renforcement des réglementations portant sur la possession des armes par les populations civiles. Un renforcement des capacités du Secrétariat exécutif de la CEDEAO et des Commissions nationales sur les armes légères est prévu pour assurer la mise en oeuvre effective de la Convention. La contribution de la société civile et des femmes dans le domaine de la construction de la paix est aussi soulignée dans le préambule du projet de convention.
Après la réunion d'Abuja, les deux consultants ont amendé le projet et soumis le texte au Secrétariat de la CEDEAO. Trois étapes restent à franchir sur la voie de son adoption. Il s'agit de :
– un examen du projet amendé par des experts gouvernementaux à la réunion prévue début mai 2006 à Bamako (Mali);
– la validation du projet de convention par les ministres des affaires étrangères de la CEDEAO au cours de leur réunion prévue aussi début mai 2006 à Bamako (Mali);
– enfin, l'adoption de la Convention par les Chefs d’État et de Gouvernement de la CEDEAO, probablement en juin 2006.
2. CHARLES NASIBU BILALI AU CONSEIL DE SÉCURITÉ DE L'ONU
Charles Nasibu Bilali, collaborateur du GRIP et membre du RECAAL (Réseau congolais d'action sur les ALPC) , a participé, le 16 mars 2006 à New York, à une séance publique du Conseil de sécurité sur les ALPC. Il avait été invité pour témoigner sur les problèmes causés par la prolifération des ALPC en RDC. Il faisait partie des 4 personnes de la sociiété civile auditionnées par le Conseil de sécurité en préparation de sa séance du 20 mars 2006 consacrée aux discussions sur un projet de résolution sur les ALPC proposé par l'Argentine.
Dans son exposé, Charles N. Bilali a présenté les voies et moyens du trafic d'armes en RDC et dans la région des Grands Lacs, ses conséquences sur la société congolaise et a formulé des recommandations. Celles-ci ont retenu l'attention de ses auditeurs parmi lesquels l’Ambassadeur péruvien Oswaldo de Rivero qui est aussi le président du Comité des sanctions visant la RDC. Parmi ces recommandations, citons entre autres, l'instauration de sanctions envers les pays impliqués dans des trafics d’armes vers la RDC; l’adoption par l’ONU du Traité sur le commerce des armes proposé par une coalition d’ONG; la mise en oeuvre de l’instrument international sur la traçabilité des armes adopté par l’ONU en 2005; l’adoption d’un instrument similaire visant les courtiers en armement afin de mieux contrôler leurs activités; le soutien au processus de paix en cours en RDC pour qu’il débouche sur la mise en place d’institutions stables.
3. MISSION DE XAVIER ZEEBROEK AU BURUNDI
En marge d'une visite d'étude effectuée par Xavier Zeebroek au Burundi du 20 février au 4 mars 2006, le Coordinateur du RAFAL a profité de l'occasion pour rencontrer plusieurs personnalités burundaises actives en matière de lutte contre la prolifération des ALPC. Ainsi il s'est entretenu avec l'ambassadeur Tharcisse Midonzi, responsable du point focal ALPC au ministère des affaires étrangères du Burundi, Chantal Niyokindi de la Ligue des droits de — 3 — l'homme ITEKA, Jacques Ntibarikure de la CPD (Colonie des Pionniers du Développement), Léonard Nzabandora de l'association pour l'Encadrement des Personnes Vulnérables en Afrique (EPVA) et Innocent Ndizeye de la Norwegian Church Aid (NCA).
Les discussions ont porté sur la relance du Réseau burundais de lutte contre la prolifération des ALPC. Ils ont convenu de prendre les initiatives nécessaires pour redynamiser la plateforme des associations travaillant sur les ALPC au Burundi.
4. PUBLICATIONS RECENTES
Deux publications récentes du GRIP traitent des questions de paix et de sécurité dans la région des Grands Lacs africains et en RDC en particulier.
• Pamphile Sebahara, La réforme du secteur de la sécurité en RD Congo, Note d'analyse du GRIP & Fondation Friedrich Ebert, 13 mars 2006, 10p. :
http://www.grip.org/bdg/g4600.html
L'article analyse le processus de formation de l'armée et de la police nationales unifiées en RDC conformément à l'Accord global et inclusif qui régit la transition politique. Il passe en revue les étapes du processus d'intégration de l'armée, identifie les acquis actuels et les difficultés à surmonter pour mieux assurer la stabilité dans le pays. Il comporte aussi 4 pistes d'actions susceptibles d'aider à sécuriser les élections générales de juin 2006. Il s'agit de la nécessité d'accélérer le processus de brassage et de mettre fin aux structures de commandement parallèles; l'amélioration des conditions de vie et de travail des soldats ; le renforcement de la cohérence et de la coordination des appuis extérieurs; l'adoption d'une approche globale du secteur de la sécurité. En effet, la sécurité concerne également les secteurs de la justice, des douanes, du système carcéral et de la bonne gestion des affaires publiques en général.
• Pamphile Sebahara, La conférence internationale sur l'Afrique des Grands Lacs: enjeux et impact sur la paix et le développement en RDC. Rapport du GRIP 2006/2, Bruxelles, février 2006, 27p. :
http://www.grip.org/pub/rapports/rg06-2_paix%20grands%20lacs.pdf
La Conférence internationale sur l'Afrique des Grands Lacs est un processus mené conjointement par l'Organisation des Nations unies (ONU) et l'Union africaine (UA) pour aider onze pays de la région (Angola, Burundi, Centrafrique, Congo-Brazzaville, Kenya, Ouganda, République démocratique du Congo, Rwanda, Soudan, Tanzanie et Zambie) à promouvoir la paix, la sécurité, la démocratie et le développement. Après plus de 2 ans de rencontres et de négociations, la Conférence a élaboré des projets de protocoles et une liste de programmes d'actions dans quatre domaines : la paix et la sécurité ; la démocratie et la bonne gouvernance ; le développement économique et l'intégration régionale ; les questions humanitaires et sociales. Un projet de lutte contre la prolifération des ALPC a été identifié comme prioritaire dans le secteur de la paix et la sécurité.
L'analyse met en évidence la pertinence d'une approche régionale pour mettre fin aux conflits et à l'instabilité. Elle soulève en même temps des doutes sur la volonté réelle de différents acteurs de respecter les engagements pris, par exemple dans la mise en oeuvre du protocole de non-agression et de défense mutuelle. Le report, au 2eme semestre 2006, du sommet des chefs d'État des pays membres de la Conférence tend à confirmer ce constat. L'étude identifie des défis à relever et des pistes d'actions susceptibles de renforcer le processus de la Conférence.